... jusqu'à ce que le sperme monte un peu aux doigts
Il doit en rester encore un peu.
Parce que j’ai beaucoup pensé à toi.
Et il doit y en avoir sur les touches maintenant.
Dès l’instant où j’ai frappé mes cinq lettres, comme autant de doigts sur chacune de mes mains.
O-M-E-G-A
Que la Lumière soit.
Et la Lumière fut.
Page blanche, panorama total, à moi de faire jouer les mots selon ma pulsion.
Le choix de la partition me revient de droit, c’est acquis.
Mon regard se voilera, je prendrai possession de mon espace vital et y déverserai ma fureur.
Des torrents incontrôlables de coalitions sauvages se feront une place de choix sous le seul éclair de mon génie intermittent, ligne par ligne et sans résistance d’aucune sorte.
Les cases mates ne collent pas, leur revêtement a peut-être été calculé pour, je n’en sais rien.
Quoiqu’il en soit, j’aurai au moins le mérite de divertir et de faire travailler les femmes de chambre.
Blanc sur blanc.
C’est parfois traître mais elles sont rôdées.
Je m’essuie encore le gland en regardant la cannette de Despe d’un air vide - lui aussi - : mouais…
Ta bouche aurait été d’un soutien logistique non négligeable mais tu étais occupée à lire des notices Ikea en taïwanais, à ce moment-là : ‘La vie est une question de priorité’, comme disait cette pure salope qui s’envoyait le bâtonnet en sortant la langue dans une ancienne pub Magnum.
Celle avec les morceaux d’amandes, là.
Et le distributeur de capotes, exact.
Tu vois : on se comprend.
On se connaît.
« Alors ? »
Alors, je joue gagnant.
La prise de risques optimale pour un gain maximum.
Et preuve que les handicaps sont souvent trompeurs, on voit régulièrement monter en flèche et caracoler en haut de tableau ceux qui se révèlent au final être les pires tocards.
Déception, affliction et annihilation sont mes trois vestales de guerre.
Alors, je joue placé.
J’assure mes arrières pour conserver mon butin plus efficacement.
Mon intérêt se fraye toujours une voie, même s’il doit souvent composer avec les inévitables aléas dus à l’inexactitude des schémas pourtant bien rompus à l’attitude humaine globale.
Perception, cooptation et anticipation sont mes trois compagnes de route.
Alors, je sais bien qu’il n’y a dans tout ça aucune alternative joyeuse et que mes promesses enflammées n’auraient pas plus de valeur qu’un vieux trombone coloré au fond d’un pot à crayons un peu sale mais il y a quand même du temps et ce temps n’aura de sens que par nous, si jamais il est destiné à en avoir.
Voilà notre pacte scellé.
Alors, il y a le frémissement des commencements.
Comme cette sensation mêlée de grandiose et d’inquiétude quand tu as écrit qu’à mes côtés, tu avais l’impression de vivre ; moi qui ignore ce que c’est, je ne pouvais qu’être satisfait.
Comme nos lèvres avides de se tordre encore aux fluctuations des cheminements de nos mains fébriles, ma queue trépidante enveloppée de ta bouche, tes paupières crispées par le plaisir rageur, nos jouissances contentées et satisfaites d’avoir jumelé nos lubricités bukowskiennes pour les faire converger en un seul point.
Comme nos regards farouches, fuyants mais pourtant entendus quand assis sur le lit, repus pour quelques instants, la bière et le vin coulent dans nos verres et que le métal hurlant offre son intermède mutuellement introspectif.
Et comme nos cerveaux malades, torturés et mis au supplice par notre intolérance envers l’impossible.
Tes mots et les miens.
Ma folie face à la tienne.
Un duel au sommet.
Alors, il y aura la nébuleuse des fins.
Comme ce sourire un peu délicat que tu faisais au type de la réception qui sera devenu forcé, cette adrénaline que tu sentiras décroître dans les ascenseurs qui mèneront à nos lits éphémères.
Comme nos baisers dorénavant furtifs et moins langoureux, nos mains à présent pendues dans le vide, ma queue moins virulente, ta bouche moins passionnée, tes yeux fixés au plafond dans l’attente de la mort et nos respirations étalées qui auront laissé à chaque numéro de chambre un peu plus de leur rythmes saccadés.
Comme nos regards qui s’éviteront dans des spasmes défensifs calculés, la musique que nous n’entendrons plus à force de ne plus voir.
Et comme nos cerveaux malades, torturés et mis au supplice par notre tolérance envers la vie.
Tes mots et plus les miens.
Ma folie bien loin de la tienne.
Des héros retirés.
Voilà notre pacte abrogé.
Alors, tu sais finalement, si mon jugement semble parfois trop amer, c’est seulement parce que je connais les gens autant que le goût des fins de bières.