J’ai pris cinq minutes de mon temps pour me regarder de face. A trop m’imaginer de dos derrière mon écran, mon carnet, à écrire mes poèmes, j’ai oublié toute réalité de ma personne.
Mais cinq minutes n’ont pas suffi.
Malgré tout, j’utiliserai le « je » non comme un fantasme mais pour continuer encore à parler de moi.
A vouloir trouver une issue, une quelconque posture dans laquelle me cristalliser, dans le but de gagner une confiance nécessaire, à vouloir devenir ce que j’étais capable de devenir, peut-être me suis-je fourvoyé ?
Bien sûr, ceci n’est pas une remise en question des fondements à peine établis, juste de quoi me donner un aperçu de la situation, un premier jet de l’introspection.
Les mots ont quitté ma voix pour se placarder sur des feuilles. Pourquoi pas ? Après tout, même avant l’écriture, on m’entendait peu. Elle m’a juste permis de l’accepter.
Je sais ma peur de l’autre. Je parle peu car j’en suis incapable. Un malaise constant me saisi dès lorsque je me trouve en société. Je ne sais pas faire passer mes idées, à peine puis-je alimenter une conversation bénigne. Tout ceci dû à un affligeant manque de confiance en soi.
Et puis tout le monde ne m’intéresse pas, en effet. Je suis sélectif de même que les gens le sont avec moi. C’est un échange viable et naturel. S’attache-t-on à quelqu’un de muet ?
Je ne demande aucune compassion, ce n’est pas le but de cet exercice. Je suis ce que j’ai toujours été.
L’écriture est un refuge dans lequel il n’y a ni juge, ni adversaire, ni intervenant régulier. Si ce ne sont mes pensées, mes délires, mes inconstances.
Je me satisfais de pouvoir dire ce que j’ai à dire, gueuler ce que j’ai à gueuler, chialer ce que je peux. A défaut de pouvoir le faire face à vous.
Tout cela pourrait être (ou devenir) une souffrance constante, elle l’est parfois, mais cet isolement me permet l’acceptation d’être ce que je suis. Mon moyen de communication. Je ne parle pas de survie, juste de maintien d’un certain équilibre, aussi précaire soit-il.
Malgré tout, dans le silence je perds beaucoup mais gagne pas mal en retour.
Et si j’arrêtais d’écrire ? Je ne crèverai pas pour autant. Mes différentes tentatives d’intégration se sont bien souvent trouvés infructueuses. Je décroche et détruit ce qui m’effraie.
N’être qu’un lâche. Pourquoi pas ?
Mais j’aime tout autant cet état de désistement, cette solitude exacerbée à la fois volontaire et forcée, que je maudis mon inadéquation.
J’aime les gens comme j’aime la solitude.
J’aime le temps qui passe comme je souhaiterais revenir en arrière.
J’aime écrire, j’aime mon style comme je déteste cet exutoire.
Mais l’on devient, avec force obstination, ce que l’on souhaite devenir. Alors, oui je deviens un poète (que ce mot semble laid et pédant) aigri, terne et solitaire.
Le tout étant de vivre sans concession. Quitte à se tromper sur toutes les lignes.
Mais ma philosophie du moment reste :
Keep on writing / Quitte à marcher seul
Donc, simplement un bilan faisant état de ma façon.
Au moins arrêterai-je de parler de mes textes.
19/12/06