L'horizon paraît tendre mais quelque chose de puissant y règne. Quelque chose de lourd et d'indéfinissable. Comme un étau invisible qui serre tout mes membres et qui me contracte en permanence, à mon insu. Un être, un état, une chose ou un monstre...
Je ne peux pas voir cet objet, ce fluide. Je ne peux qu'observer comment il agit sur moi, quelles sont ses influences pour le connaître et le définir.
Enlever les mors, briser les chaînes invisibles, casser le moule, étendre tout et reprendre à zéro.
Se ramollir le caractère à force d'écouter les critiques des autres stipulant qu'il faut être plus souple. Puis se le renforcer à coup d'enclumes de la vie, pour résister aux chocs. Puis à nouveau tout rendre?
Etre à l'écoute, donner de son temps, comprendre, être empathique, généreux. Puis devenir égoïste, impétueux, méchant, calculateur...
D'où viennent ces élans?
De la justice et de son antipode. La justice en nous rend meilleur, l'injustice amer.
Ces rebellions contre ce qui est établit, qui se répandent dans l'âme comme des virus exterminateurs, qui haïssent tout ce qui est sur leur passage y compris vous-même, sont des armes jetées à l'injustice qui prend siège d'abord en vous même.
Qu'est ce qui est injuste? Est ce que je ne choisis jamais?
Nous avons déjà le choix de nous énerver ou d'accepter. Celui qui accepte connaît, celui qui se révolte, ignore.
Je suis aveugle avec parfois des jets de lumières qui me tombent sur les yeux et qui me font connaître l'autre côté. Mais ils sont si rares. Chez moi, il fait aveugle, sourd et méchant. Tout est hostile; l'argent, le travail, la famille et même l'amour !
Je pourrais choisir que l'amour existe, qu'il serait véritablement dénué de toute forme d'intérêt aussi. Mais j'ai choisis la suspicion, le doute, le contrôle sur l'incontrôlable. Je le vois injuste ou alors je me dis qu'il le deviendra bien évidemment.
Cette injustice est née au même endroit que moi, je dirais même que c'est elle qui m'a élevée.
Elle m'a gangrené l'esprit, elle m'a soufflé son monde, son origine, sa force et ses armées.
Elle guette chaque issue de secours pour s'y loger en barrage à néants de solitudes. Elle aime la haine, la colère, la destruction. Elle ne propose aucune alternative, elle est ou elle meurt.
Sa mort la rendrait inutile comme toute chose et celui qui la porte en elle pense que c'est de sa vie dont il dépend. Il pense même qu'elle et lui ne font qu'un. Tel un amour fusionnel, pure, originel.
Elle remplit chaque espace vide , elle love les coups d'énergies inutiles, elle embrasse les discours d'arguments solides et inébranlables car tout ici est injustice. Elle a toujours raison du plus faible, toujours le dernier mot sur les plus forts. Pour celui qui l'héberge; elle est toute puissante.
La laisser partir reviendrait à dire que l'on enterre ses parents et ses amis le même jour sans personne pour se faire consoler.
Elle est aussi le prémisse de la tristesse, elle est son ennemie pourtant. Car la tristesse est un fleuve qui lave de tout les discours de haine qui empêchent de voir. Elle isole l'être de sa révolte pour en faire un ami des concessions et des regards clairs. Elle le rend docile, ouvert, libre. Mais elle le démuni de ce qu'il croyait être...
Lors de cet enterrement silencieux, vous sentirez la tristesse vous prendre le corps. Elle peut être violente aussi si on lui ferme la porte au nez. Si on la laisse bouillir en nous alors que la gorge se noie de larmes. C’est ainsi que renaît Injustice. Certains y verraient peut-être une seconde chance mais ce serait surtout une nouvelle guerre. Une guerre parasitaire qui détruit toujours en premier lieu son hôte. Car elle est ingrate, elle est à son image et à celle de ceux qui ne veulent plus s’en séparer que dans la mort.
En déposant ses armes au pied de son berceau, versez y toujours quelques larmes de tristesse pour la nourrir d'une nouvelle vie.
Ainsi, un jour, vous vous réveillerez peut-être avec en vous une sensation fluide et légère d'être juste envers vous-même.