33.
Le séduisant Croc a fait s’asseoir les filles… elles lui obéissent à l’œil ! Clara parait passablement perdue… elle se demande ce qui lui arrive… me regarde, m’interroge ! si je pouvais lui répondre ! ma réponse consolatrice que je réusite… « ça va, ça va ! ». Je constate le fait sûr… que je suis pas rassurant ! Laurie se tique plutôt ! s’envenime !
« ça va Gaston ? ça va ? mais non Gaston ! les voilà partis pour toi ? mais ils sont sur le retour ! pendules ! ils reviennent dans l’instant… la seconde ! »
Je me retourne guetter la seconde… je vois rien ! l’exagération ?
« ah je vois ! tu n’y crois pas ! »
« certainement ! certainement Laurie… mais j’ose… l’interrogation qui me trottine… la question galopante ! toute cette histoire… quelles origines ? »
« le voilà qui joue l’innocent ! les origines ? mais tu les connais voyons ! voyou ! que je me mette encore à genou de ré-expliquer ? tu vas me dire que t’ignores peut être ? que tu te souviens plus ? »
Il serait bien temps d’apprendre plus tard ! d’abord suivre le courant… la cachette ! Croc veut nous amener loin d’ici ! qu’on ne fasse pas le jeu d’Enguerran ! je veux bien ! ne demande pas mieux ! ni plus ! je suis disponible ! je montre la voiture… je propose des lieux… des tas ! le mauvais pas encore… que j’ai pas à décider ! rien à envisager ! d’accord ! je me retire… vers Croc, que je sois dans l’angle de Clara… La discussion repart… s’éternise ! on parlemente d’une planque ! en revenir à ce que je disais ? suffit ! l’idiot qu’on me prend pour ! je vais m’héberger à la voiture… je reçois les clés de Croc, qui me dit de faire attention. C’est entendu ! j’accepte l’avertissement ! la bonne surprise aussi ! Clara qui me rejoint ! elle a pas plus que moi à se mêler des plans… tant mieux ! elle m’accompagne vers le parking… faut contourner la boîte vers la droite, descendre un petit escalier de terre… ça glisse, puis le parking immense alors… tout petits vous êtes par rapport !
Là l’un et l’autre on se retrouve enfin seuls… je dirais presque… les voitures nous entoure, elles sont nombreuses ! j’ai rarement vu autant de voitures ! je suis couac ! ohla ! y en a bien pour trois, quatre parkings. Elles se sont données rendez vous toutes les voitures ce soir ! leurs proprios en boîtes pendant qu’elles trinquent ! Je vous assure ! vraiment à pas y croire la place occupée par toutes ces bagnoles… Oh ! Clara rigole… pouffe plus exactement ! Je suis content aussi, on se renvoie la patate chaude du rire… Elle se met à l’aise, le plus qu’elle peut ! Il fait plutôt froid, nous sommes la nuit, et sur le parking ! Hi… hi ! ça la refait rire ! ce que je peux être bête ! tant mieux ! mon ébahissement qui la fait se poiler ! ah ! une bonne observation ! Puisque nous en sommes à être stupide, moi le premier, sorte de chef, de leader, je prends l’initiative… qu’on devrait s’asseoir dans la voiture de Croc ! Elle m’interroge tout de suite, inquiète…
« C’est sa voiture ? »
« Celle de son frère ! »
C’est d’accord ! elle est partante ! Elle est toute illuminée… si je peux m’exprimer ainsi, nous restons dans la nuit pour sûr ! Dans la voiture on s’installe comme on peut… je la renifle maintenant tout à fait mieux, elle a de l’alcool plein la poire. Je m’entrave clairement qu’elle serait pas si flamme avec moi sinon… pourtant elle jouait pas ce jeu tantôt avec Croc devant Lucie ? N’importe ! Nous sommes mélangés l’un l’autre et à la voiture, aux sièges… je soulève ses cheveux son haut, j’atteins sa poitrine… je suis très inconfortable, j’ai les jambes répandues d’un coté et de l’autre du siège conducteur… Clara a baissé le siège passager… j’essaie de m’engouffrer vers elle, elle s’agrippe à moi pour que nous tombions tous les deux. Vraiment, l’instant je nage en plein bonheur… un bonheur tout de chair ! j’y mords ! je la fais rugir ! c’est une fille de rire, elle pousse des grincements de gorge… hin… han… je vous imite mal ! On se bécote, califourchon, très mal installés, je répète, durant quelques minutes… je voudrais me relever, enlever ce qui nous pose encore défaut pour aller plus loin. Elle se relève d’un coup aussi ! Un coup d’œil à la vitre ! Elle se montre sérieuse… m’annonce :
« Oh merci Gaston ! j’ai cru qu’il allait venir nous trouver ! quelle comédie ! toi et moi ! ah ! hi ! oh ! nous l’avons bien eu ! »
Si je suis vexé vous imaginez… je réajuste mes effets, je me réconforte dans moi… je la boude un peu ! Elle se fait câlinante alors ! quel jeu ! si elle jongle pas ! ah ! ah je suis accrobaté ! d’une main elle me lance… me gifle ! à sa merci ! guise ! pas le temps la peine de le dire : merci ! Sa main remonte dans ma manche… je vais pas tenir à bouder, tourner la tête longtemps ! Je lui demande pour couper court :
« Qu’est ce que tu joues ? »
L’erreur ! elle se pique ! elle croit que je veux me venger ! mais de quoi ? de quoi ? j’interroge ! que c’est trop fort ! osé ! que je la provoque ainsi ! elle ! Je lui fais de grands yeux qui comprennent pas… regardent juste… vous noterez, toujours le regard traduit l’incompréhension… les gosses pour les résumer, c’est simple… très simple ! deux yeux sur un estomac ! ils sont tout question ! écarquillés ! c’est pourriture les questions, ça les retourne les innocents… ils veulent savoir… mon dieu ! … s’ils savaient !
« Qu’est ce que je joue Gaston ? moi qui joue ! ah j’applaudis ! ah je félicite ! champion ! sur la ligne d’arrivée ! vue sur le podium ! ah c’est le cinéma ! lignes sues par cœur ! vraiment ! un tel toupet ! »
Quand même je finirais bien par savoir de quoi il en retourne ? mes lecteurs finiront par se demander si je les tourmente pas en bateaux ! pour m’amuser ! ça me fait rien m’amuser ! je trouve pas ! je perds du temps là ! à me souvenir ! je perds de l’envie… C’est terrible pour ça mes anecdotes… je tourne autour des sentiments, je les affiche… c’est du remue couteau dans les méninges… pour finir mal je pense.
Je me plains je devrais pas ! Clara me le fait bien entendre…
« T’es à te lamenter tout temps toi Gas’ ! »
Le surnom dont elle m’honore, direct ! Nous sommes familiers je vois ! y a de quoi, certain ! nous étions à deux doigts ! je deviens vulgaire, je passe…
« Me lamenter ? »
« Oui ! t’es qu’un mur ! et tape ta tête dessus ! et tape la tête des autres ! »
J’ai un peu le droit d’être étourdi… je trouve !
« Et vous tapez rien vous autres ? vous flambez pas ? sans raisons aucunes d’illuminer ? tape pas le pas ? la danse ? je te vois pas tango dans cette voiture ? dis luciole ! »
Ça lui plait pas, je me doute… c’est des « tu recommences ! »… le mieux, encore, reprendre où je l’avais laissée… trifouillages vestimentaires ! Je la refais rire ! nous sommes réconciliés ! l’unité du rire, toujours ! stop ! s’arrête là l’entente ! le rire ! fort à parier que c’est ce qui rend le sexe si universel, le rire ! les guilis ! li ! lis…
Je signalais, dehors, s’entreposaient une masse mastodonte de voitures… Un boucan vacarme s’élance alors ! la moitié de ces caisses qui se tirent en même temps ! plutôt : la moitié du parking s’effondre ! le goudron, écrasé jusque là par la nuit, refait surface… s’élève ! c’est lui qui concentre tout le bruit ! tout le bruit lui monte, le roule, le force, le teste… il va rompre ! nous sommes Clara et moi, tangués dans la voiture… elle a du mal à résister à l’appel de ses camarades ! quel soulèvement ! épique ! Je ressens, mes genoux me font signe, l’attrait de notre abri pour suivre ses comparses. Clara rigole plus du tout ! où a-t-elle posée son sourire, ses dents en attendant ? je me concentre sur ça, plus que ça… j’entends plus le bruit, la marche des roues sur l’asphalte… je regarde sa figure… c’est triste, il fait toujours nuit pourtant… je me rabâche je sais ! trente fois que je vous dis : il fait nuit ! toujours ! mais trente voitures aussi viennent de s’enfuir ! quel safari ! faux de dire : j’en revenais pas ! j’étais revenu… j’étais sur le sourire de Clara, scotché… la solution le scotch ? les gens font ça ? se foutent un sourire, un bout d’adhésif, et moindre coup de vent, de moteur, tout s’envole, se défait ! elle rigolait plus ! le sourire passe, mais les dents ? ses petites dents lumineuses d’entrée de grotte… qu’est ce qu’elle a pu en faire ? son sac ? je vérifie !
« Je veux voir ton sac ! où tu les caches ? »
« Mon sac ! salaud ! rends ça ! »
Comme elle s’énerve ! m’assomme ! vlan ! j’en prends mon grade ! Elle me rabat ! me rebat !
« T’as qu’à prendre tes plastiques sur toi ! j’en ai pas un ! »
« Plastique quoi ? tu fonds ? »
« Tu m’y cherches quoi ? la main dans le sac ! capotes ? »
« M’en fous de capotes ! tes dents ! »
« Qu’est ce que t’insinues ? »
Elle devait pas les avoir loin… elle mord… non, vraiment elle mord, mon bras ! puis se recroqueville ! se bouche les oreilles !
« T’as peur que je crie ? »
Je lui lance ! la perche pour elle ! mais je me fatigue ! ma rébellion soudaine ! même Clara s’en étonne… elle pensait qu’on jouait pour quelques actes encore… non ! je coupe court ! j’ouvre la porte pour sortir. Elle s’agrippe à moi, tout son poids qui me tire, griffe ma veste. J’ai encore une des jambes coincée de son côté du siège, derrière le levier de vitesse, elle se pose dessus. Elle veut me supplier, mais pas avant de savoir si la force lui suffira pas pour me retenir ! Vraiment elle veut pas que je sorte ! Elle braille ! de bon cœur ! que si je la quitte, quelle félonie ! elle plante sa comédie ! quelle ratatouille ! ça fume partout ! pas elle, dehors ! dehors ça fume ! En entrouvrant la porte je tombe nez à yeux devant la furie ! les voitures chantent par leurs pots ! elles s’échappent ! un balai désorganisé, mais qui a lieu, devant nous, incontournable qu’on le voie. Je secoue Clara qui se morfondait sur mon genou, je lui balance :
« Elles s’envolent, Clara ! toutes les caisses s’envolent ! regarde cet envoûtement de gris ! de tôles ! c’est magique ! c’est de la magie qui flotte Clara ! »
« Elles bougent pas, con ! rien ! tu rêvasses ! tu veux t’enfuir ! »
Je la pousse, non je rêve pas ! Et puis je me rassieds convenablement, en passant le pied par-dessus le volant. Hop ! On est mieux… moi oui je suis mieux… je rassemble mes esprits… c’est eux qui s’envolaient mes esprits… pas de doute ! quand je rouvrirai les yeux : plus rien ? si ! toutes là encore ! elles voguent, elles font roulé-boulé dans la nuit, le sol en hauteur… je sursaute de concert avec leurs hoquets ! je suis dans le mouvement ! Clara y croit pas, me tâte tant je deviens irréel… mais du coup digne d’intérêt ! Elle s’inquiète maintenant pour moi ! ou pour la voiture ? je pourrais l’emporter dans mes idioties ! elle se souciait pas le moins du sourcil de moi ! ohlala non ! mais si j’enrhumais la voiture ? et elle avec ? elle me dessine Peter Pan ! je vais faire comme les bagnoles en l’air d’après elle ! donc elle avoue ! que ces voitures font la fête au dessus de notre pare brise !
« Oui Gaston ! au dessus de notre pare brise ! elles font des cabrioles ! tu les vois ? »
Si je les vois ? elle se moque ! je n’y tiens plus, je sors ! La portière s’ouvre facilement, je manque de me laisser emporter dans mon élan, de trébucher de la petite hauteur qui me reconnecte au sol… je pense bien que Clara m’a poussé dans le dos… j’ai les clés, j’ai qu’à l’enfermer telle ! qu’elle derrière les vitres ! oh mais ça s’ouvre de l’intérieur ! elle me fait signe ! elle mime de lever le loquet avec ses doigts ! elle m’éblouit enfermée de bonne volonté qu’elle est… je ré-ouvre de moi-même… elle se fait silencieuse complètement… je cherche ses lèvres, j’ai une main qui avance toute seule, guidée par les hormones ! C’est l’attirance naturelle… ça y est, le contact ! mes ongles se rafraîchissent, touchent du mou… sa langue ! elle s’affaire avec sa langue ! elle me recouvre de salive ! bave presque ! je vous précise, pourquoi ces tâtonnements ? ces recherches ? qu’on y voyait de moins en moins ! le bal des phares s’est éteint ! l’obscurité règne, on est enfermé à l’abri dans le noir… personne nous voit… on se voit pas non plus… on se devine un peu… ça laisse la place à l’imagination, l’excitation, surtout pour elle je dois dire… je suis habitué à ce que les filles ferment les yeux dans les intrigues intimes, se cachent aux paupières lourdes… fantasment de leur côté, de l’autre côté…
Et Croc et Laurie pendant ce temps ? vous ne pouvez vous en fichtre ! je décrirais pas les croustillances qu’ont amenés les ébats aveugles qu’on a eu Clara et moi ! pas lubrique le Kwizera ! du tout ! loin de là ! puritain à peu de choses ! je déplace donc la vision… vers Croc et Laurie… sans rien me vanter, toute l’histoire a bien durée trois heures, nous deux seuls dans la voiture… Non pas que je me mette martel en tête, mais nous dans notre casemate, on fut à l’abri des explosions du ciel ! du sol !
On sort de notre abri au petit matin… il fait clair à nouveau, tout est recouvert d’une fine couche bleutée… c’est froid aussi… personne n’a encore trop respiré parmi les hommes… Clara est décoiffée, y a des rêves qui lui ont laissé des traces sur le visage… c’est l’illusion une fille au réveil… vous vous recoucheriez tellement ça se passe de commentaires… Ses cheveux frappaient son front dès qu’elle bougeait trop vite, c'est-à-dire à chaque mouvement parce que nous étions le matin et que le rythme était ralenti par toute cette brume qui s’échappait du bleu ambiant. On avait du mal à couper l’air d’ailleurs, et on luttait contre du vent fictif. De partout on se prenait les pieds dans des déchets, des carcasses de carlingues qui clinquaient en venant cogner contre nos chaussures puis contre les murs, toujours à rechercher l’adversité. Tout autour c’était vraiment bien le matin, on sentait l’âme des objets vides, qui se rapprochent de rien, qui n’avaient pas encore le poids des significations qu’ils prennent au fur et à mesure qu’on les touche, qu’on les déplace. Croc nous faisait signe de l’autre bout du parking, de grands gestes, qui déplaçaient des trombes de brumes, comme je vous contais. Que je vous conterai encore… installé tel… au petit matin des choses… un prémisse…